04 juillet 2007

Un mot encore sur la politique québécoise, mais je vous avoue que j'ai le goût de parler d'autres sujets sur ce blogue! J'ai toujours eu du mal à supporter les one-track minds, des gens d'une seule passion, et je ne voudrais certainement pas succomber à la tentation de me limiter à un seul sujet.

Donc, la politique québécoise, disais-je. L'arrivée de Pauline Marois à la tête du PQ me réjouit, ceux d'entre vous qui me connaissez bien n'en seront pas étonnés. Ce qui me réjouit particulièrement dans ce retour, en fait, c'est la grande liberté de parole qu'elle semble s'être donnée. Jusqu'ici, je ne l'ai pas entendue retomber dans les travers de quelqu'un qui a passé trop de temps aux côtés de l'administration publique et qui en a adopté le langage ampoulé presque par osmose.

C'est devenu un cliché de louanger les personnalités publiques qui, je le mets entre guillemets, «disent les vraies affaires». Je crois toutefois que ce qui plaît tant chez elles, ce n'est pas tant le contenu que le contenant. Les anglophones ont un mot pour décrire cela: plainspoken. Ça tient aussi bien du choix des mots que de la structure des phrases et même du ton de voix. Des phrases courtes, qui respirent bien. Pas trop de subordonnées à tiroirs. Des verbes d'action. Des mots simples, mais qui peuvent exprimer des réalités complexes.

Et c'est là qu'on doit tracer la frontière entre le politicien plainspoken et le politicien démagogue ou populiste. Ainsi, René Lévesque - malgré ses phrases interminables! - était le modèle québécois par excellence de l'homme public plainspoken: grand vulgarisateur, s'exprimant de façon claire et simple mais ne cédant jamais au simplisme, toujours respectueux de l'intelligence de son public.

Or, Lévesque était journaliste - un grand. Un journaliste à l'américaine, par ailleurs, ce qui explique tout, je crois.

Si le métier de journaliste aux États-Unis reconnaît une bible, c'est l'ouvrage The Elements of Style, de Strunk et White. On trouve dans ce petit manuel de rédaction journalistique tous les principes du plainspeak: «plainness, simplicity, orderliness, sincerity». Dans ces quatre mots, on retrouve tout le style de René Lévesque. Et c'est ce que nous recherchons encore chez nos politiciens.

George Orwell l'a exprimé encore bien plus clairement dans son essai de 1946, Politics and the English Language. Orwell plaide pour un style direct, pour l'emploi de mots de tous les jours, et crache sur ceux qui «défendent l'indéfendable» avec une langue «pétrie d'euphémismes, avare de clarté, vague et nébuleuse». Plus de 70 ans plus tard, les mots d'Orwell me semblent toujours d'actualité!

Voici les six principes d'écriture qu'Orwell expose dans son manifeste:
  1. Never use a metaphor, simile, or other figure of speech which you are used to seeing in print.
  2. Never use a long word where a short one will do.
  3. If it is possible to cut a word out, always cut it out.
  4. Never use the passive where you can use the active.
  5. Never use a foreign phrase, a scientific word, or a jargon word if you can think of an everyday English equivalent.
  6. Break any of these rules sooner than say anything outright barbarous.

Dans les discours que Pauline Marois a prononcés depuis son retour en politique, elle semble prendre le pari de la clarté, non seulement dans ses idées, mais aussi dans son langage. Si elle persiste dans la voie du «plainness, simplicity, orderliness, sincerity», je crois que les Québécois lui feront confiance. Mais si elle succombe à la tentation de la langue de bois...

3 Comments:

At 2:23 p.m., Anonymous Anonyme said...

Unde date bien choisie pour un tel commentaire! ;)

 
At 1:15 a.m., Blogger Catherine Bourgault et Pascal Mailhot said...

Donc, on doit éviter les phrases en latin ?

 
At 6:40 a.m., Blogger Stephane said...

Hmmmoui, je dirais que le latin est à éviter, à moins de s'appeler Benoît XVI... et on s'entend qu'il n'a pas besoin de se faire réélire, lui! ;-)

 

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